Alors que le cannabis gagne en popularité pour soulager certains symptômes liés au cancer, une question persiste : peut-il aussi être à l’origine de cette maladie redoutée ? Une étude récente apporte des éléments de réponse qui pourraient bien bouleverser la perception de cette plante.
Une étude inquiétante : le cannabis et le risque de cancers de la tête et du cou
Une vaste étude de cohorte menée aux États-Unis auprès de 116 076 adultes a mis en lumière un lien potentiellement dangereux entre les troubles liés à la consommation de cannabis (TCC) et divers types de cancers de la tête et du cou (CTC). Les résultats montrent que les personnes atteintes de TCC, qui continuent à consommer du cannabis malgré les effets négatifs sur leur vie ou leur santé, présentent un risque significativement accru de développer des cancers de la bouche, de l’oropharynx, du nasopharynx, des glandes salivaires et du larynx par rapport à un groupe témoin.
L’étude, qui s’appuie sur 20 ans de données provenant de nombreux prestataires de soins de santé, soulève ainsi une inquiétude majeure : le cannabis, souvent perçu comme un remède naturel, pourrait-il également être un déclencheur de cancers ?
Le spectre du tabac plane-t-il sur le cannabis ?
Le Dr Joseph Califano, co-auteur de l’étude, exprime une préoccupation qui fait écho à l’histoire du tabagisme.
« Sommes-nous en train de répéter les erreurs du passé avec le cannabis, soutenu par une industrie puissante et largement accepté par le public et les législateurs ? Découvrirons-nous des années plus tard que le cannabis est cancérigène, une fois qu’il sera trop tard pour revenir en arrière ? », s’interroge-t-il.
Cette comparaison avec le tabac n’est pas anodine. La combustion de toute matière végétale, y compris le cannabis, produit des substances cancérigènes. La fumée de marijuana contient en effet certains des mêmes composés nocifs que celle du tabac, mais la question de savoir si elle peut causer le cancer reste sans réponse définitive.
Des voies alternatives, mais des doutes persistent
Cependant, il est important de noter que le cannabis ne se consomme pas uniquement sous forme fumée. Les huiles, produits comestibles, patchs et capsules sont autant de méthodes alternatives qui évitent la combustion. Mais là encore, les preuves sont insuffisantes pour déterminer si ces modes de consommation augmentent le risque de cancer.
Les auteurs de l’étude appellent donc à des recherches futures plus approfondies, avec des contrôles rigoureux, pour comprendre les mécanismes à l’origine de ce lien potentiel entre le cannabis et les cancers de la tête et du cou. Ces études devront également explorer la relation dose-réponse pour déterminer si le risque augmente avec la quantité de cannabis consommée.
Une réalité australienne : Le CTC en chiffres
En Australie, le CTC est une réalité préoccupante. En 2020, 1 177 décès liés à des cancers de la tête et du cou (y compris des lèvres) ont été recensés, dont 873 hommes et 304 femmes. Bien que ces chiffres soient alarmants, il reste à déterminer quelle proportion de ces décès pourrait être attribuée à la consommation de cannabis.
Alors que le débat sur le cannabis continue de s’intensifier, cette étude publiée dans JAMA Otolaryngology–Head & Neck Surgery vient rappeler l’importance de la prudence. Si le cannabis présente des bénéfices potentiels pour la gestion des symptômes du cancer, les risques associés ne doivent pas être ignorés. Comme le dit le vieil adage, mieux vaut prévenir que guérir.