1,4 million de personnes. Ce serait le nombre de fumeurs de cannabis quotidiennement en France. Ce chiffre d’un rapport parlementaire sur les différents usages du cannabis en 2021 démontre à quel point la marijuana reste une substance illicite largement consommée. C’est d’ailleurs là tout l’enjeu de sa décriminalisation pour les sénateurs en faveur de cette réforme. L’un des principaux arguments dans ce cas est la distribution d’un produit plus qualitatif qui favorisera la protection de la santé publique. Pourtant, la communauté médicale n’est pas toujours de cet avis. C’est notamment le cas du toxicologue Jean-Pierre Goullé et de son confrère, le pharmacologue Jean-Paul Tillement. Dans une tribune pour Le Quotidien du Médecin, les deux professeurs parlent d’une « grave faute sanitaire » et d’une « irresponsable erreur sociale » en se référant à la légalisation du cannabis. Explication.
Quels sont les enjeux de la légalisation du cannabis ?
Une proposition de loi pour légaliser le cannabis en France a été déposée en 2019 par plusieurs membres du Parlement (proposition de loi nº 2099). Selon les défenseurs de cette démarche, une légalisation contrôlée serait la solution pour tirer les meilleurs avantages de cette plante psychotrope qui, malgré des sanctions pénales sévères, recensent toujours 18 millions d’expérimentateurs dans l’Hexagone. Pour eux, la croissance exponentielle de la consommation de marijuana sur le territoire démontre l’inefficacité des mesures répressives qui ont été mises en place au cours de ces 50 dernières années. D’ailleurs, les Français seraient les premiers consommateurs en Europe en ce qui concerne cette drogue.
Ce serait alors pour cette raison que la légalisation du cannabis s’impose. Par la même occasion, la France pourrait rattraper son retard sur le marché international et commencer à exploiter également les bénéfices de ce dernier. Outre l’accès à une nouvelle de recettes fiscales, l’État pourrait aussi — grâce à la « légalisation contrôlée » — reprendre le contrôle sur la chaîne de distribution. En effet, cette initiative permettra de proposer dans le commerce des variétés de plantes de meilleure qualité, et donc moins dangereuses pour la santé.
Des arguments pro-légalisation qui seraient pourtant « sans fondement »
Les rapports sur les bénéfices pouvant s’écouler de la légalisation du cannabis se démultiplient chaque jour. Les pays envisageant ou ayant initié une démarche sur la dépénalisation partielle ou complète de ce produit psychotrope sont pareillement de plus en plus nombreux ces dernières années. Cependant, ce projet n’est pas encore à l’ordre du jour pour la France. En réalité, autant le gouvernement que la communauté médicale restent réfractaires à cette réforme. Pour les deux académiciens Jean-Pierre Goullé et Jean-Paul Tillement en particulier, les arguments en faveur de la décriminalisation du cannabis seraient tout simplement infondés.
Pour cause, autoriser la vente et la possession de marijuana encouragerait la consommation de ce produit qui s’avère tout de même être une drogue. Faciliter l’accès à cette substance ne devrait alors pas être une priorité pour ces professeurs. D’autant plus que cette mesure ferait tout, sauf promouvoir la santé et la sécurité publiques.
Goullé et Tillement sont d’avis que l’alcool et le tabac font déjà suffisamment ravage en France. Pour rappel, l’Hexagone enregistrerait 75 000 décès annuels liés au tabagisme. Tandis que l’alcool coûterait chaque année la vie à 45 000 personnes. Sans parler bien évidemment du fait que leur consommation entraîne des troubles addictifs qui finissent par nuire au quotidien des Français. La légalisation du cannabis favoriserait ainsi l’expansion d’un troisième fléau national qui est loin d’être inévitable.
Libre consommation, il serait aussi question de santé publique
Il s’agit de l’un des arguments majeurs pour à la fois les pro-légalisation et les détracteurs du cannabis. Pour Jean-Pierre Goullé et Jean-Paul Tillement, le débat n’aurait toutefois pas lieu d’être. Pour cause, le cannabis est associé à une longue liste d’effets néfastes — autant sur le plan physique que psychique. Ils pointent entre autres du doigt l’exacerbation de troubles psychotiques (dont la schizophrénie).
Aussi, la légalisation du cannabis aggraverait les risques indirects liés aux symptômes courant de la consommation d’une substance psychoactive. C’est notamment le cas des accidents de la route qui pourraient se voir augmenter à cause des manifestations comme l’ivresse cannabique ou encore l’altération des capacités cognitives. Sans parler du fait que cette drogue peut entamer sur le bien-être psychologique. Des doses importantes de THC pourraient effectivement aggraver l’anxiété et la dépression. Tout cela pour dire que, pour ces professeurs, la décriminalisation du cannabis en France ferait plus de mal que de bien.
Alors, la légalisation du cannabis aurait-elle réellement plus d’inconvénients que d’avantages ? Dans tous les cas, la Direction générale de la Santé ne semble pas encore prête à envisager cette option.