Notre surprise atteint son paroxysme lorsque nous découvrons que les drogues peuvent être utilisées comme matériel de base pour des outils de construction. C’est ce qu’a fait l’Équateur après un nombre record de saisies de drogue. L’Équateur saisit des quantités croissantes de drogues en provenance des pays producteurs andins et à destination des marchés de consommation d’Amérique du Nord et d’Europe. Le pays a commencé à mélanger la cocaïne saisie à du ciment pour empêcher sa réutilisation. Peut-on faire pareil avec le cannabis ?
L’encapsulation des drogues, une méthode innovante ?
Les autorités équatoriennes ont commencé à utiliser une méthode appelée encapsulation. Celle-ci consiste à mélanger la poudre de cocaïne à du ciment pour fabriquer des blocs de béton afin d’empêcher sa réutilisation et de détruire rapidement la substance illicite.
Dans une interview accordée au portail InSight Crime, le sous-secrétaire au contrôle des drogues du ministère de l’Intérieur, Edmundo Mera, a expliqué la méthode. Il a précisé que depuis le début de l’année et jusqu’au 14 octobre 2022, l’Équateur a détruit un total de près de 180 tonnes de drogues. Parmi celles-ci, 61 % ont été détruites par la technique de l’encapsulation.
Par ailleurs, cette méthode est également rapide et indispensable en Équateur. Rien que dans les ports, les saisies ont augmenté de 42 % en 2022. En effet, l’encapsulation peut détruire jusqu’à 1 500 kilos de drogue par heure, alors que l’incinération est limitée à 70 kilos par heure.
Qu’en est-il de l’encapsulation du cannabis ?
Les expériences concernant l’encapsulation du cannabis n’ont pas encore été étudiées mais cela semble fonctionner.
La théorie est la suivante : le processus de destruction consiste à pulvériser la substance en minuscules fragments. Ensuite, le cannabis pulvérisé, le ciment, le sable et l’eau sont mélangés. Pendant la phase de prise, c’est-à-dire l’hydratation, le ciment réagit chimiquement avec les autres matériaux présents. Il forme ainsi une matrice stable, dure et impénétrable. Cela empêche la drogue d’être récupérée ou de s’infiltrer dans le sol. Alors que la destruction de 15 tonnes de cannabis peut prendre jusqu’à plusieurs semaines, la même quantité peut être encapsulée sans risque en une journée.
En outre, le Service scientifique et de laboratoire de l’ONUDC fournit une expertise technique aux pays qui cherchent à éliminer en toute sécurité les drogues saisies. Actuellement, l’ONUDC travaille avec la Colombie, l’Équateur, le Guatemala, le Honduras et le Pérou sur son programme de solutions, de formation et d’orientation en matière d’élimination des drogues. Ce programme est mis en œuvre avec le soutien financier du Bureau of International Narcotics and Law Enforcement Affairs des États-Unis.
Est-il nécessaire de détruire les cannabis saisies ?
En effet, le cannabis saisi ne devra pas nécessairement être détruit. Les autorités devraient réfléchir à tout le potentiel que recèle cette plante. On constate aujourd’hui que le cannabis présente un grand intérêt en médecine, en cosmétique et même en art. Chaque pays peut ainsi investir dans l’industrie du cannabis, qui représente un marché très intéressant.
Une cinquantaine de pays ont déjà approuvé l’usage thérapeutique du cannabis, et une dizaine ont légalisé son usage récréatif. Aux États-Unis, le cannabis légal a généré vingt-cinq milliards de dollars de revenus en 2021, soit un taux de croissance annuel de 33 %. Dans l’une des plus grandes économies du monde, plus de 400 000 personnes travaillent désormais directement dans des entreprises liées à « l’or vert ».
En conclusion, l’encapsulation semble être un moyen efficace de recycler les drogues saisies. Toutefois, d’autres options peuvent constituer une référence. Néanmoins, l’industrie du cannabis et ses ramifications présentent les caractéristiques typiques des marchés émergents. Une fois que le marché aura séparé le bon grain de l’ivraie en termes d’entreprises, et que la réglementation sera plus claire, il n’y a aucune raison pour qu’il ne devienne pas une industrie respectable comme les autres.