Le cannabis médical suscite de plus en plus d’intérêt pour son potentiel à traiter diverses maladies rares. Grâce à des programmes spécifiques, les chercheurs découvrent des solutions inédites, souvent inattendues, pour des pathologies complexes et mal comprises. Bien que des progrès aient été réalisés dans le soulagement des douleurs, inflammations et maladies neurodégénératives comme Alzheimer et Parkinson, le potentiel du cannabis pour le traitement des maladies rares reste largement inexploité.
Myasthénie grave : Un espoir cannabinoïde
La myasthénie grave est une maladie auto-immune qui affaiblit progressivement les muscles squelettiques. Affectant environ 200 millions de personnes dans le monde, ses symptômes incluent vision floue, paupières tombantes, difficulté à mâcher, avaler et parler, ainsi que faiblesse musculaire. La maladie résultant de l’attaque des anticorps sur les récepteurs de l’acétylcholine, bloquant la transmission normale des signaux nerveux.
Des recherches ont montré que le THC peut inhiber l’acétylcholinestérase, l’enzyme dégradant l’acétylcholine, améliorant ainsi son niveau et améliorant la réponse musculaire. Des États comme l’Illinois ont reconnu la myasthénie grave dans leurs programmes de cannabis médical. Le Dr Allan Frankel, en Californie, traite cette maladie avec un mélange de CBD et de THC-A, rapportant des résultats prometteurs.
Sclérose Tubéreuse Complexe : Réduire les crises avec le CBD
La sclérose tubéreuse complexe (STB) est une maladie génétique rare provoquant la croissance de tumeurs bénignes dans le cerveau et d’autres organes. Elle touche entre 7 à 12 personnes sur 100 000 dans le monde, souvent observée chez les jeunes enfants. Les symptômes incluent l’autisme, l’épilepsie, le retard de développement et les problèmes comportementaux.
Des mutations génétiques perturbent l’expression des protéines hamartine et tubérine, essentielles pour la régulation de la croissance cellulaire. Le système endocannabinoïde (SEC) joue un rôle clé dans la STB, les récepteurs CB1 étant anormalement élevés dans le cerveau des enfants atteints. Le CBD, reconnu pour ses propriétés antiépileptiques, a montré des effets bénéfiques.
GW Pharmaceuticals a obtenu l’approbation de la FDA pour l’Epidiolex, un spray à base de CBD utilisé pour traiter les épilepsies des syndromes de Lennox-Gastaut et de Dravet. Bien que coûteux, ce médicament représente une avancée majeure, offrant de nouvelles perspectives pour d’autres traitements similaires.
Maladies Mitochondriales : Soulagement des symptômes
Les maladies mitochondriales sont un groupe de troubles génétiques affectant les mitochondries, les « centrales énergétiques » des cellules. Touchant environ 11 à 12 personnes sur 100 000, elles se manifestent souvent dès l’enfance, généralement à partir de l’âge de 10 ans. Les symptômes incluent des troubles neurologiques, des convulsions, des douleurs chroniques, une faiblesse musculaire, des troubles de l’ouïe et de la vision, des troubles de l’apprentissage, des maladies pluriorganes et des troubles respiratoires.
Les patients atteints de maladies mitochondriales ont rapporté que l’huile de cannabis aide à gérer les crises et à réduire les douleurs chroniques. En Géorgie, cette maladie est reconnue dans le cadre du cannabis médical. Les capacités antioxydantes des cannabinoïdes, en particulier, semblent améliorer la fonction mitochondriale. Bien que les recherches soient encore préliminaires, elles offrent un espoir réel pour ces patients.
Neuromyélite optique : Réduire la douleur et l’inflammation
La neuromyélite optique, ou maladie de Devic, est une maladie auto-immune rare qui provoque une inflammation récurrente et une démyélinisation du nerf optique et de la moelle épinière. Touchant entre 1 à 2 personnes sur 100 000, elle est souvent confondue avec la sclérose en plaques (SEP), ce qui complique son diagnostic. Les patients souffrent d’une perte de vision, d’une faiblesse musculaire, de troubles de la coordination, ainsi que de problèmes intestinaux et urinaires.
Une étude de 2013 a révélé que les patients atteints de neuromyélite optique présentaient des niveaux élevés d’endocannabinoïdes 2-AG et d’anandamide, suggérant que ces substances étaient libérées en plus grande quantité pour atténuer la douleur et prévenir l’hyperalgésie. Ces découvertes montrent que le cannabis pourrait offrir un éclaircissement significatif en modulant la réponse de la douleur.
Syndrome d’Ehlers-Danlos : Soulagement de la douleur neuropathique
Le syndrome d’Ehlers-Danlos (SED) est un groupe de maladies génétiques affectant la peau et les tissus conjonctifs, avec une prévalence d’environ 20 pour 100 000. Le SED provoque des articulations hypermobiles, une peau hyperélastique, des douleurs chroniques, des spasmes musculaires, ainsi que des complications cardiovasculaires. Les mutations génétiques responsables du SED concernent la production de collagène, essentielle pour la structure des tissus conjonctifs.
Des témoignages anecdotiques suggèrent que le cannabis peut soulager la douleur neuropathique et les spasmes associés au SED. Le palmitoyléthanolamide (PEA), un composé ayant une affinité avec les récepteurs du système endocannabinoïde, a également montré des effets positifs sur la gestion de la douleur dans le SED. Bien que le PEA ne soit pas un cannabinoïde traditionnel, il peut augmenter les effets de l’anandamide, un endocannabinoïde naturel, par effet d’entourage.
Maladie de Behçet : Réduction de l’inflammation
La maladie de Behçet est une maladie auto-immune rare dans laquelle le système immunitaire attaque différentes parties du corps. Elle est plus courante dans certaines régions d’Asie et d’Afrique, avec une prévalence allant de 1 pour 15 000 à 1 pour 500 000 en Amérique du Nord et en Europe du Nord, à 2 pour 1 000 en Turquie. Les symptômes incluent des lésions cutanées et génitales, un gonflement des articulations, des douleurs chroniques, des œdèmes cérébraux, des caillots sanguins et des anévrismes.
Les cannabinoïdes comme le THC et le CBD sont reconnus pour leurs effets anti-inflammatoires. Aux États-Unis, certains patients ont signalé un soulagement subjectif de leurs symptômes grâce au cannabis. L’Illinois a inclus la maladie de Behçet dans sa liste des pathologies autorisées pour le traitement au cannabis médical, offrant une nouvelle option thérapeutique à ceux qui en souffrent.
Pemphigus : Soulager les douleurs et prévenir les infections
Le pemphigus est un groupe de maladies auto-immunes rares affectant la peau et les muqueuses, notamment la bouche. Touchant entre 10 à 50 personnes sur 100 000, il est plus fréquent chez certains groupes ethniques, notamment les Juifs ashkénazes. Les symptômes incluent des démangeaisons, des cloques douloureuses et des plaies qui peuvent se propager. Sans traitement, il peut entraîner des infections sévères, potentiellement mortelles. Les traitements conventionnels incluent des stéroïdes puissants, tels que la prednisone, qui peuvent avoir de nombreux effets secondaires.
Le pemphigus est causé par des anticorps attaquant la desmogléine, une protéine essentielle à l’adhésion des cellules épithéliales. Des études ont montré que le cannabis peut être efficace contre plusieurs maladies auto-immunes cutanées, grâce notamment aux récepteurs CB₂ présents en grande concentration dans l’épiderme, qui ont des effets immunologiques et anti-inflammatoires. Les cannabinoïdes topiques peuvent également offrir des propriétés antibactériennes, antivirales et antifongiques, aidant à prévenir les infections secondaires. Bien que des brevets pour des traitements à base de cannabis contre le pemphigus aient été déposés, les preuves cliniques restent limitées.
Myoclonie diaphragmatique : Une réponse naturelle aux spasmes
La myoclonie diaphragmatique est une pathologie extrêmement rare, avec seulement 50 cas enregistrés dans le monde. Elle provoque des spasmes rapides et involontaires du diaphragme, entraînant des contractions entre 35 et 480 fois par minute, ce qui crée un effet de « danseuse du ventre ». Les causes peuvent inclure des troubles nutritionnels, des dysfonctionnements nerveux, des médicaments ou l’anxiété.
Bien que non fatale, cette maladie provoque un inconfort important et des difficultés respiratoires et alimentaires. Les traitements actuels sont limités, mais incluent le blocage temporaire du nerf phrénique pour soulager les symptômes. Chaz Moore, un patient célèbre souffrant de cette maladie, a trouvé un soulagement efficace grâce au cannabis médical. Les propriétés antispasmodiques et anticonvulsivantes des cannabinoïdes, notamment le CBD, présentent un potentiel thérapeutique considérable pour cette maladie.
La maladie périodique (Fièvre Méditerranéenne Familiale)
La Fièvre Méditerranéenne Familiale (FMF) est un trouble inflammatoire héréditaire touchant principalement la poitrine, l’abdomen et les articulations. Cette maladie affecte environ 10 à 50 personnes sur 100 000 dans le monde, mais la prévalence peut atteindre 1 sur 200 dans les populations méditerranéennes, notamment chez les Arméniens, Grecs, Italiens et Juifs séfarades. La FMF provoque des crises de douleur, de fièvre et d’inflammation pendant plusieurs heures, qui se répètent de manière intermittente. Chez 90 % des patients, les premières crises apparaissent avant l’âge de 18 ans et le diagnostic est généralement posé vers 20 ans.
La FMF est provoquée par des mutations des gènes régulant la pyrine, une protéine clé dans le contrôle des processus inflammatoires. Les traitements actuels incluent des analgésiques, des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et la colchicine, bien que leur efficacité soit limitée.
En 1997, le cannabis a été envisagé pour la première fois comme traitement potentiel de la FMF. Une étude à double insu contrôlée par placebo, menée sur un seul patient, a révélé que le THC permettait de réduire considérablement le besoin d’analgésiques à base d’opiacés. Cependant, cette étude n’a pas été suivie par d’autres recherches, laissant un champ important pour des investigations futures sur l’utilisation du cannabis dans le traitement de la FMF.
Le syndrome CDKL5 : Une lueur d’espoir dans l’obscurité des maladies rares
Le syndrome CDKL5 est une maladie génétique extrêmement rare liée au chromosome X, provoquant des convulsions sévères et des retards du développement. Avec seulement plus de 1 000 cas enregistrés dans le monde jusqu’à présent, cette maladie reste peu étudiée et mal comprise. Étant une transmission dominante liée à l’X, elle impacte principalement les enfants.
Ce trouble génétique récemment découvert se manifeste par des crises graves, des retards du développement, des problèmes de contrôle moteur et de parole, entre autres anomalies. Il est associé à des mutations du gène CDKL5, situées sur le chromosome X.
Bien que la recherche formelle sur l’utilisation du cannabis comme traitement pour le syndrome CDKL5 soit quasi inexistante, plusieurs familles ont rapporté des améliorations significatives avec l’utilisation du CBD. Par exemple, en 2014, un enfant de 11 mois a montré des améliorations notables dans le contrôle musculaire et le contact visuel après avoir commencé le CBD.
Cependant, l’histoire tragique de Harper Elle Howard, décédée à l’âge de 6 ans des suites du CDKL5, mise en lumière à la fois l’espoir et les défis associés à ces maladies rares. Les crises de Harper n’ont pas pu être maîtrisées avec les traitements conventionnels, mais le CBD a offert une période de répit et une qualité de vie améliorée pendant plusieurs années.
Malgré ces histoires poignantes, il est essentiel de noter que le cannabis médical n’est pas une panacée pour toutes les maladies rares. Chaque cas est unique, et des recherches plus approfondies sont nécessaires pour comprendre pleinement comment le cannabis peut être utilisé efficacement dans le traitement de ces affections complexes.
Ce ne sont que des exemples parmi tant d’autres de maladies rares qui pourraient éventuellement bénéficier des propriétés thérapeutiques du cannabis. La recherche continue et l’ouverture à de nouvelles approches médicales sont cruciales pour offrir de l’espoir et des solutions aux patients confrontés à ces défis médicaux uniques.