2023 : L’année du cannabis européen

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Comme annoncé par le #2022chanvremenbon, cette année fut une année cruciale pour le monde du cannabis européen. À mesure que le secteur prend de l’envergure, la « vague verte » atteint progressivement l’Europe. On observe alors l’évolution du statut de la plante, autant au niveau de l’usage médicinal que récréatif. Les économistes sembleraient confiants quant au développement de ce marché. Il pourrait atteindre plus de 61 milliards de dollars d’ici 2026 selon les prévisions. La filière du chanvre industriel pourrait participer à la relance économique post-pandémie. Sa culture gagne du terrain sur les terres agricoles du continent. À travers le #2022chanvremenbon, faisons un point sur le statut du cannabis en Europe au cours de 2022

France : Une timide évolution quant aux réglementations

Les législations relatives à la vente et à la consommation du CBD ont connu un progrès important dans l’Hexagone. Pour rappel, il s’agit d’une substance non psychotrope issue du chanvre (contrairement à son cousin, le THC). La bataille juridique entre l’État et les défenseurs de la filière française du CBD a été particulièrement rude. 

Même si la légalisation de l’usage récréatif n’est pas encore pour demain, la situation évolue. La question de la légalisation, de la dépénalisation, mais aussi de la nécessité de promouvoir la sécurité publique se retrouve souvent au centre des débats. Il y a également la volonté de rassurer les acteurs économiques. Tout cela contribue à l’évolution du statut du cannabis en France. 

Le CBD est autorisé en France 

  • En France, la vente de cannabidiol est autorisée. Seule condition : le taux de tétrahydrocannabinol (THC) contenu dans les produits commercialisés n’excède pas les 0,3 %. 
  • Le 24 janvier 2022, le Conseil d’État a pareillement levé l’interdiction de vente et de consommation de fleurs de CBD brutes.  

La vente et la consommation de THC toujours interdites

Les sanctions pénales restent en vigueur pour la marijuana. L’Assemblée nationale a rejeté une nouvelle proposition de loi pour la légalisation de l’usage récréatif en France. Ce, malgré le dernier rapport parlementaire favorable à une légalisation encadrée.

Prolongation de la recherche sur le cannabis médical

François Braun, ministre de la Santé, a annoncé devant la Commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale en septembre la prolongation de l’expérimentation sur l’usage médical de la plante.

Malte : Leader européen dans la légalisation du cannabis récréatif

Décembre 2021 est une date historique pour Malte. Elle a marqué la légalisation de l’usage récréatif de la plante sur le territoire. Le pays prend ainsi la première place en Europe, devant l’Allemagne et les Pays-Bas. Il a lancé et introduit des lois pour réglementer l’usage personnel pour les adultes

  • Autorisée : la possession de 7 grammes de marijuana à l’extérieur (50 grammes à la maison). 
  • Interdit : fumer dans les espaces publics ou devant les mineurs. 

Aussi, les Maltais peuvent créer des clubs sociaux de marijuana. Ces organisations à but non lucratif peuvent distribuer des produits à base de cannabis à leurs membres.

Photo de palais de l'europe

République tchèque : En chemin vers la légalisation

Le gouvernement de coalition tchèque rédige un projet de loi visant à réglementer l’industrie de marijuana à usage adulte. Il devrait être présenté en mars 2023. Quant à la légalisation complète, elle pourrait entrer en vigueur d’ici janvier 2024. La Tchéquie invite d’ailleurs le reste de l’Europe à faire de même.

En septembre, le gouvernement a demandé à Jindřich Vobořil de mettre en place un projet de loi pour faciliter la légalisation du cannabis à usage récréatif pour les adultes. Plus tard, le commissaire aux drogues tchèque a annoncé que les responsables gouvernementaux sont en contact avec l’Allemagne dans le cadre d’une coordination et d’une consultation techniques.

De plus, la République tchèque est l’un des rares pays européens à cultiver du chanvre avec une teneur en THC allant jusqu’à 1 % à des fins industrielles. La majorité des pays de l’UE, eux, ont opté pour la limite de THC à 0,3 % (suivant les recommandations du Parlement européen).

Allemagne : Légalisation du cannabis récréatif d’ici 2023

Le chancelier Olaf Scholz et la coalition en feu tricolore se sont engagés à lancer la légalisation et la commercialisation du chanvre à usage récréatif pour les adultes. L’objectif du gouvernement serait de « supprimer les obstacles juridiques et réglementaires d’ici un à deux ans ». Voilà un projet très ambitieux ! Une telle décision irait à l’encontre de la Convention unique de 1961 des Nations Unies sur les stupéfiants. Il en est de même pour les réglementations de l’UE interdisant la vente de cannabis. Selon le Dr Constantin Von der Groeben de l’entreprise de cannabis médical Demecan, l’Allemagne serait toutefois susceptible de « voir une approbation de la nouvelle loi au cours de l’année 2023 ».

Pologne : L’Eldorado de l’industrie du CBD en Europe

Si la Pologne est considérée comme LE paradis du cannabidiol en Europe, ce n’est certainement pas pour rien. En réalité, les CBD shops pullulent dans le pays. Le marché local profite peut-être aussi de l’absence d’un cadre parfaitement réglementé pour se développer. Il s’agit cependant d’une arme à double tranchant. Bien que le CBD soit légal en Pologne, le gouvernement peine effectivement à lui donner un statut précis. Si on parle souvent de « complément alimentaire », certains législateurs semblent aussi privilégier l’appellation « produit alimentaire » ou « produit thérapeutique ».

Pareillement, l’absence de directives législatives concernant le seuil légal pour le taux de THC peut porter préjudice aux professionnels de l’industrie. Ces derniers se sont toutefois accordés sur une limite maximale de 0,3 % de THC. En revanche, la loi polonaise est formelle quant au statut du cannabis pour usage individuel. Au même titre que les autres drogues à usage récréatif, la possession et la consommation de marijuana sont passibles de sanctions sérieuses. 

Aux termes de la loi relative à la lutte contre la toxicomanie du 29 juillet 2005, la peine encourue pour possession d’une petite quantité de weed peut aller jusqu’à 3 ans d’emprisonnement. Dans la pratique, en revanche, les tribunaux appliquent généralement une certaine tolérance selon le principe « soigner plutôt que punir ». Au lieu des poursuites, la Pologne opte ainsi pour les programmes de traitement, le retrait temporaire de certains droits ou encore le paiement d’amende forfaitaire.

Luxembourg : Production et vente légales de cannabis récréatif approuvé

La dépendance actuelle du Luxembourg vis-à-vis des importations fait partie d’un ensemble de facteurs encourageant l’approbation d’un projet de loi en 2022. Celui-ci a pour but de réglementer la production et la distribution légales de marijuana au niveau national. Cependant, il ne s’agit pas d’un premier pas pour le Luxembourg. À l’instar de l’île de Malte et de l’Espagne, le pays autorise effectivement depuis 2021 la culture à domicile et la consommation à titre privé. Les Luxembourgeois peuvent alors cultiver jusqu’à 4 plants par ménage. Attention ! L’usage en milieu public reste interdit.

Suisse : Début des essais pour l’usage récréatif à Bâle 

Voilà un virage vers la légalisation (nécessaire) pour la Suisse. En effet, 56 tonnes de cannabis seraient consommées annuellement sur le territoire. Cela équivaut à 750 000 joints allumés chaque jour. Cette demande élevée pourrait d’ailleurs booster l’économie du pays. Avec la levée de l’interdiction, le marché suisse générerait alors des revenus annuels de 582 millions de CHF (594,35 millions d’euros), importations comprises. Une autre étude datant de 2020 a évalué le marché à 520 millions de dollars (508,54 millions d’euros).

Quoi qu’il en soit, un projet pilote (qui se déroulera à Bâle) explorera la vente réglementée de cannabis aux pharmacies locales, comme aux Pays-Bas. L’Office fédéral de la santé publique en Suisse, en partenariat avec l’Université de Bâle, mènera un essai. Celui-ci regroupera 220 000 consommateurs réguliers actuels. Ce programme pourrait être étendu à Zurich, Genève et Berne, dont les autorités locales ont demandé le déploiement des essais similaires.

Photo de union européenne

Royaume-Uni : Le maire de Londres ouvre la voie à la dépénalisation

En mai 2022, Sadiq Khan — maire de Londres — a initié un programme pilote visant à décriminaliser la possession de petites quantités de cannabis. À travers une entité spéciale (London Drugs Commision), il prévoit une approche plus efficace quant au contrôle de la substance. Ce projet prend place dans des arrondissements tels que Lewisham, Greenwich et Bexley. 

Les personnes interpellées en possession de petites quantités de marijuana ne seront donc pas arrêtées. Elles auront plutôt droit à des cours et des conseils par rapport aux dangers de la drogue. Appliqué dans les bonnes conditions, ce système pourrait contribuer à la réduction des crimes et des incidents de récidive. Si l’essai est concluant, il pourrait mener à la dépénalisation de l’usage récréatif du cannabis au Royaume-Uni.

Néanmoins, le remplacement de Boris Johnson pourrait certainement modifier la direction que prendra cette réforme dans les années à venir.

Belgique : Bruxelles envisage la légalisation

Selon Philippe Close, bourgmestre de Bruxelles, la mise en place d’un plan national sur les drogues s’impose. La capitale belge pourrait ouvrir la danse en matière de légalisation de cannabis. Pour l’heure, la Belgique interdit la possession et la culture de marijuana. Aux yeux de la loi, il s’agit d’une infraction sanctionnée d’une amende, voire d’une peine de prison. Souvent, on observe toutefois une certaine souplesse vis-à-vis de la consommation pour usage personnel. La quantité maximale admise dans ce cas est fixée à 3 grammes sur soi et à une plante pour la culture domestique.

Portugal : Une approche plutôt flexible quant à la consommation de drogues  

En réalité, le Portugal a voté la dépénalisation de l’usage de toutes les drogues le 29 novembre 2000. Cela exclut cependant l’usage de stupéfiants dans les lieux publics. De même, le trafic et la culture du cannabis restent pénalement répréhensibles. La levée des sanctions ne concerne que la consommation personnelle. 

Depuis 2018, la consommation — sous certaines conditions — de marijuana à des fins médicales a également été approuvée par l’Assemblée de la République portugaise. L’usage des produits à base de CBD doit dans ce cas se faire sur ordonnance d’un médecin si les traitements conventionnels se sont avérés inefficaces. Si la teneur en THC est inférieure à 0,3 %, l’achat et la consommation de CBD peuvent se faire sans prescription. 

C’est pourquoi vous pouvez trouver dans les rues de Lisbonne des boutiques spécialisées qui vous proposeront d’acheter légalement des produits destinés à la consommation. La multiplication de ces magasins et l’assouplissement des réglementations encouragent par ailleurs une normalisation du cannabis qui pourrait se concrétiser par sa légalisation complète. D’autant plus que les personnalités politiques comme Miguel Costa Matos osent montrer leur approbation face à cette réforme.

Espagne : L’éden des clubs de cannabis 

Le principe du « Club Social Cannabique » met la lumière sur les zones d’ombre entourant les réglementations en vigueur dans le pays. En réalité, la loi espagnole décriminalise l’usage récréatif de marijuana et l’autorise dans les espaces privés. Il en est de même pour la culture d’un petit nombre de plants, à condition qu’ils ne soient pas visibles de l’extérieur. À l’heure actuelle, il existerait environ 700 clubs de ce genre à travers l’Espagne. La majorité exige des frais d’adhésion ou des invitations exclusives avant de pouvoir les rejoindre.

Pays-Bas : Le « canna-tourisme » n’est pas au goût de tout le monde

Femke Halsema, maire d’Amsterdam, souhaiterait interdire l’accès au cannabis aux touristes. Cependant, le conseil municipal n’est pas du même avis. Pour rappel, l’usage de la marijuana est décriminalisé aux Pays-Bas, mais il n’est pas légalisé. Les réglementations actuelles autorisent les cafés à vendre une quantité inférieure à 5 grammes pour une consommation personnelle. Il en est de même pour la culture domestique de 5 plantes maximum. Comme à Malte, au Luxembourg et en Espagne, l’utilisation publique demeure interdite. 

En règle générale, les propriétaires de cafés s’approvisionnent auprès de cartels sur le marché illicite. D’où l’appel contre le « canna-tourisme » lancé par la maire d’Amsterdam. Dans les propositions de Femke Halsema figurait entre autres l’introduction de : 

  • Un critère de résidence pour acheter du cannabis ;
  • Un démarrage progressif de la réglementation locale et 
  • Une mise en place d’un « label de qualité » pour les coffee shops. Celui-ci se concentrera sur les chaînes d’approvisionnement et de distribution. 

Comme on pouvait s’y attendre, cela a suscité une importante controverse, notamment de la part des touristes. À noter tout de même que ce projet n’a pas été approuvé par le conseil municipal d’Amsterdam. Les probabilités qu’il soit promulgué de si tôt sont moindres.

Photo de parlement européen

L’expérimentation de la légalisation récréative

Actuellement, seule la consommation de cannabis (et non la possession) est techniquement dépénalisée aux Pays-Bas… Bien qu’en pratique, il y ait une faille évidente dans cette logique. Cependant, la Hollande envisage aussi des projets pilotes pour réglementer le marché aux termes de l’accord de coalition de 2017. Cela implique la production et la vente légales dans les cafés de 10 municipalités, créant une « chaîne fermée ». L’expérience a été reportée à 2023 et est certainement à surveiller. 

Pour le gouvernement néerlandais, l’objectif de l’expérience consiste dans tous les cas à déterminer la faisabilité d’un approvisionnement contrôlé en cannabis de qualité. Elle permettra également de définir l’impact de cette réforme sur la criminalité, la sécurité, les nuisances publiques et la santé publique.

Italie : Le statut privilégié du cannabis auprès des consommateurs

En juin 2022, un projet de loi sur la dépénalisation du cannabis est parvenu à la Chambre des députés. Il devait passer au Sénat en septembre. Le projet de loi visait à :

  • La réduction des peines de prison pour la distribution à petite échelle ; 
  • L’allègement des sanctions pour l’usage privé et 
  • L’autorisation de cultiver 4 plants de marijuana pour un usage personnel.

Cela fait suite à une tentative ratée de légalisation du cannabis en février. Les critiques ont fait valoir que les tribunaux avaient « étouffé le processus démocratique après qu’une pétition ait recueilli 630 000 signatures ». 

Par ailleurs, une étude a eu lieu en Italie entre 2016 et 2018 et s’étendait sur 106 provinces. Elle se portait principalement sur les ventes de médicaments pharmaceutiques. Celle-ci a démontré qu’il y avait un effet de substitution substantiel, renforçant l’hypothèse d’automédication concernant l’usage du cannabis thérapeutique.

Pour rappel, l’effet de substitution est un terme microéconomique relatif à l’évolution du prix d’un produit et de la quantité demandée par les consommateurs. Cette étude a également mis en évidence la substitution des médicaments sur ordonnance (anxiolytiques, sédatifs, opioïdes, antidépresseurs et antipsychotiques) par de la marijuana.

Danemark : Programme pilote de cannabis récréatif de 5 ans initié à Copenhague

Le Danemark est sur le point de mettre en place un programme pilote de 5 ans initié dans la ville de Copenhague. Celui-ci encadrera la distribution de marijuana dans des points de vente (tels que les pharmacies) contrôlés par l’État. Cela ne concernerait que les résidents adultes des municipalités de la capitale danoise. Selon GCI, le projet de loi légaliserait et permettrait aux « citoyens d’acheter, de posséder, de cultiver et de consommer du cannabis à des fins personnelles ». Ce serait une démarche historique pour la Scandinavie. Dans tous les cas, la principale motivation du gouvernement pour tester ce système est due à l’augmentation constante de la consommation de cannabis malgré qu’il soit une substance illicite.

L’année 2022 offre une projection 2023 plus que prometteuse !

Les 27 États membres de l’Union européenne semblent s’ouvrir à de nouvelles perspectives quant à la réforme du statut du cannabis. Le Conseil de l’UE soutient d’ailleurs une autre approche des politiques en matière de drogues fondée sur les droits de l’homme. Au cours de son mandat de six mois en tant que président de l’UE, la République tchèque a notamment encouragé la légalisation de la plante. 

Le Journal officiel apportait un soutien immédiat à ses initiatives (et à celles de l’Allemagne) pour favoriser l’évolution vers des marchés réglementés de cannabis à usage adulte. Cela permettra de reconnaître le droit de chaque pays à dépénaliser la possession personnelle, mais participerait surtout à la protection accrue de la santé publique. De plus, cela soutiendrait la politique de diversité, d’égalité et d’inclusivité.

Comme à son habitude, la France piétine toutefois sur le sujet. L’Hexagone envisage depuis des années d’approuver le cannabis médical, à l’instar de nombreux autres pays de l’UE. Cependant, cette perspective s’est récemment éloignée. En effet, le gouvernement a discrètement décidé de prolonger une « expérimentation » menée depuis bientôt deux ans. La plante, qui présente un intérêt limité, mais réel dans des maladies très douloureuses, deviendra-t-elle alors un jour un médicament dans l’Hexagone ? Le gouvernement repousse le moment du choix, au grand dam des patients, de certains médecins et de la majorité des élus. Finalement, l’accès au cannabis médical sera, au mieux, attendu pour avril 2024.

Écrit par Romain.l, responsable des réseaux sociaux chanvre_H_i_b_o_o_x_x_x_france.

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